Malgré un traitement très efficace, la rétinopathie diabétique (RD) reste une cause fréquente de malvoyance en France, du fait d’une prise en charge souvent trop tardive et d’un défaut de dépistage. L’objectif d’un fond d’œil annuel pour tout patient diabétique, tel qu’il est recommandé par les Sociétés Savantes et l’ANAES, est loin d’être atteint: une enquête menée par la CNAMTS sur un échantillon de patients diabétiques de type 2 a montré que moins de 40% des patients diabétiques avaient bénéficié d’un examen ophtalmologique durant l’année précédente.
Ces résultats ont été confirmés par l’étude ENTRED. Cette situation ne devrait pas s’améliorer dans les années à venir du fait du nombre croissant de patients diabétiques et de l’évolution de la démographie médicale.
Le dépistage de la RD par photographies du fond d’œil est une méthode largement utilisée dans les pays du Nord de l’Europe depuis une quinzaine d’années. Ce système de dépistage comprend la prise de photographies du fond d’œil sans dilatation pupillaire et la lecture différée des photographies par un lecteur entraîné; ce système permet de sélectionner les patients diabétiques avec une rétinopathie diabétique pour les adresser à l’ophtalmologiste. L’efficacité de cette méthode pour dépister la RD est supérieure à celle de l’examen ophtalmoscopique et en fait même la méthode de référence pour dépister la rétinopathie diabétique.Le réseau OPHDIAT© d’Ile de France (Ophtalmologie-Diabète-Télémédecine) s’appuie sur :
1/ Des sites de dépistage : Les photographies du fond d’œil sont réalisées grâce à des rétinographes non mydriatiques numériques. Ces appareils sont de maniement simple et la prise de photographies du fond d’œil peut être réalisée par des orthoptistes ou des infirmières. Ils peuvent être mis en place soit dans des services hospitaliers de diabétologie ou de médecine interne à orientation diabétologique, soit en ville dans des sites de dépistage fixes ou mobiles à disposition des médecins généralistes. L’absence de dilatation pupillaire améliore l’acceptabilité de la méthode, la multiplication possible des sites de dépistage augmente leur accessibilité, tous facteurs permettant d’améliorer le dépistage de la RD.
2/ Un Centre de lecture : Les photographies du fond d’œil transmises vers un centre de lecture sont lues de façon différée par les ophtalmologistes Le gain de temps médical réside dans la possibilité de screener un grand nombre de patients diabétiques en peu de temps, puisqu’il est possible de lire les photos de 15 à 18 patients par heure. Le Centre de lecture comprend 5 ophtalmologistes lecteurs, assurant chacun une vacation hebdomadaire de lecture. L’existence d’un centre de lecture unique est un gage d’assurance qualité : les ophtalmologistes, lecteurs validés, lisent à tour de rôle les dossiers, ce qui permet d’alléger la charge de lecture. Les compte-rendus signés sont envoyés aux médecins traitants. 3/ Les transmissions par Internet : La numérisation des images du fond d’œil autorise leur télétransmission sécurisée et permet une organisation en réseau de sites de dépistage autour d’un centre de lecture ophtalmologique. Ainsi, début 2006, le réseau OPHDIAT articule 14 centres de dépistage de l’Ile de France, hospitaliers et libéraux, autour d’un centre de lecture ophtalmologique, via un serveur sécurisé. Des sites de dépistage ont été ouverts dans 9 services de Diabétologie ou de Médecine Interne de l’APHP. Ils permettent, dans le cadre de cette implantation hospitalière, d’assurer le dépistage annuel des patients diabétiques fréquentant ces services, ce qui n’était auparavant plus possible du fait d’un nombre insuffisant de vacataires ophtalmologistes. Implantés également en ville dans des centres de santé, au sein de réseaux “Diabète” ou dans des prisons, ces sites de dépistage ont pour objectif d’améliorer le dépistage de la RD au sein de la population, des populations précaires et/ou ayant un accès difficile aux ophtalmologistes. Au cours de 2005, près de 5 500 patients diabétiques ont été dépistés par OPHDIAT. OPHDIAT paraît donc constituer une solution valide pour améliorer la prise en charge ophtalmologique des patients diabétiques. Il ne se conçoit cependant pas comme une méthode exclusive de dépistage, les patients diabétiques devant évidemment continuer à bénéficier régulièrement d’un examen complet chez l’ophtalmologiste. Néanmoins, la mise en place de cette modalité supplémentaire de dépistage est susceptible d’améliorer l’adhésion aux recommandations de dépistage annuel, et aidera certainement à faire face aux difficultés croissantes que laisse redouter l’évolution du nombre des patients diabétiques. Il demeure, qu’actuellement, l’absence de cotation dans la CCAM de la lecture des photographies du fond d’œil par télémédecine est un frein certain à la diffusion de cette méthode de dépistage.